lundi 14 avril 2008

Varanasi : course d’orientation au Golden Temple



Un bus nous emmène de Khajuraho à Satna. C’est l’occasion de rencontrer Iman, un Iranien qui voyage avec deux compatriotes. Longue discussion typique de voyageurs : pourquoi la route et ce qu’elle vous apporte ? Iman nous explique un point de vue intéressant : c’est l’occasion pour lui de mieux connaître des représentants de cultures qui lui sont complètement étrangères, voire ennemies et de réviser ses préjugés. Ou comment voyager en Inde peut rapprocher Iraniens et Israéliens. Notre nouvel ami est aussi très impressionné de nous voir voyager avec Malik et se révélera un compagnon « plus que serviable ».

L’arrivée en gare de Satna nous réserve une surprise qui n’en est pas une : le train est en retard. Iman et ses amis nous récupèrent sur le quai et nous indiquent une first class waiting room qui hume bon le pipi. Farida se trouve une nouvelle correspondante qui partage les mêmes goûts artistiques. Le petit groupe se sépare au moment où le train est annoncé sur le quai numéro 2. Un train arrive. Pas le nôtre. Nouvelle annonce pour le quai numéro 3, cette fois. On se déplace et on attend. Un train arrive au quai 2. Les gens embarquent. Soudain surgit Iman, complètement stressé, venu s’assurer que nous montions dans ce train. Notre train est toujours indiqué au quai 3 mais pendant que Iman s’agite, les haut-parleurs rectifient l’erreur. Paniqué, Iman croit bien faire en sortant Malik de sa poussette pour nous pousser dans le premier wagon sans se rendre compte qu’avec nos énormes sacs, il nous est impossible de nous déplacer dans les couloirs étroits. Il nous lance alors dans une course effrénée du wagon de queue à celui de tête, Pierre poussant un buggy vide et Farida chargée de son sac, 20 kg, et de Malik, 15 kg. Le sac de fruit tombe par terre provoquant la panique de Malik et nous freinant dans notre course. Nous arrivons exténués à notre second class AC (le grand luxe pour les connaisseurs !) et nous nous écroulons sur notre couchette. Le reste du voyage sera du pur confort.

Arrivés à Varanasi nous optons pour une guesthouse recommandée par Frank, le Danois de Khajuraho qui avait confié une mission à Pierre : ramener la clé de sa chambre qui était restée dans sa poche. Cette pension est tenue exclusivement par de jeunes hommes dont la plupart possède le QI d’une limace dont le cerveau aurait été grillé par un abus de substances qui fait dire : « Hey man ! » à tout être masculin entrant dans son champ de vision. D’ailleurs, il s’échappe régulièrement des chambres, des odeurs qui prouvent bien la recherche spirituelle qui anime les jeunes en visite à Varanasi. Cette équipe de gaillards est peu pressée au service mais déploie une énergie hors du commun à exciter Malik chaque fois nous venons de le calmer. Sinon, ils sont sympas.

Ca y est : nous sommes installés ! La spirituelle Varanasi nous tend les bras. La ville est comme un bon film dont tout le monde parle : « Faut qu’tu restes au moins une semaine pour comprendre le truc ! », « C’est trop powerfull ! », « Trop plein de cows ! »… Bref, semblerait qu’il n’y a pas de mots assez forts en français pour décrire cette magie. Trop de bonne pub tue la pub !

Varanasi magnifique : ses ghats, son marché, ses temples, son Ganges, ses balades en bateau, ses sadhus, ses petites ruelles, ses bûchers, ses coupures d’électricité, ses singes et ses vaches (ah oui, c’est comme ça qu’on dit), ses cyclopousses, ses cérémonies et sa mixité religieuse. C’est vrai, la ville dégage une sacrée énergie ressentie nulle part ailleurs.

Et maintenant Varanasi détestable : on ne se refait pas, la religion, côté humain, c’est pas notre truc ! Une visite impromptue au Golden Temple nous servira de leçon. En nous promenant dans le marché, nous arrivons devant une des entrées surgardées du fameux Golden Temple. A un militaire : « Pouvons-nous entrer ? », « Bien sûr, pourquoi pas ? » Commence la mésaventure. A l’entrée, un vendeur glisse à Pierre : « Si on vous demande, dîtes que vous êtes hindous. » ; nous passons devant un mirador et une dizaine de militaires armés. Les brahmanes qui nous servent de guides imposés nous expliquent que le temple se protège des attentats islamistes puisque nous nous trouvons aussi sur une terre sacrée pour les musulmans. Nous sommes entraînés à toute vitesse dans une sorte de course d’orientation où chaque poste est tenu par un brahmane qui, au lieu des énigmes, nous fait réciter des prières, moyennant de coquettes sommes d’argent. Arrivés devant le saint du saint, on essaie de nous faire signer un registre pour lequel il faut montrer nos passeports à d’autres militaires armés. Une plaque derrière nous indique clairement cette fois que le lieu est interdit aux non hindous. Même s’il sait pertinemment que c’est pur mensonge, un des guides répète à Pierre qu’il doit déclarer être hindou. C’en est trop ! Nous exigeons de rebrousser chemin. Ce qui est fait, non sans passer par deux nouvelles étapes payantes ! Le fou rire nous guette lorsqu’on demande à Farida de donner son nom et celui de Malik pour la prière et que devant un tel déploiement anti-musulman, elle s’annonce comme Fafi et Michel. Ecoeurés, nous nous précipitons vers la sortie. Farida hyperventile, Malik est assommé, tandis que Pierre se demande encore comment on a pu lui tirer autant de fric ! Subitement, c’est toute la ville qui semble étouffante : de l’air !

Le lendemain, ça va mieux. Une jolie balade sur les ghats nous réconcilie avec la douce atmosphère du Ganges.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Trop trop drôle cette (més-)aventure dans le temple hindou...et en effet, ça me confirme bien la bêtise humaine concernant la religion...lol...(Aïcha)